Fragments (extrait n°6)
Il y a quelque chose qui s’invente.
Une indolence, une exigence.
Une recherche de ce qui élève l’âme.
Il y a des rues vivantes de musiques, de conversations.
Le temps semble apprivoisé.
Sous leurs costumes, les comédiens ont chaud mais ils gardent toujours un sourire à offrir aux passants.
Ici, on fait appel à la meilleure part des hommes.
A la curiosité, au désir de beauté.
Il y a du désir partout, ici.
Je le vois sur les visages.
C’est lui qui donne à cette jeune fille l’énergie, chaque soir, de jouer devant des salles pas toujours pleines.
Une rage d’aimer, de partager, d’y croire, de vivre.
Il y a des coups de cœur qui passent de bouches en oreilles.
Le feu qui tombe du ciel n’entame pas l’enthousiasme.
Parfois, au détour d’une rue, l’on tombe sur une petite place ombragée, véritable îlot de fraîcheur et de paix.
Un joueur de Hang envoie dans l’atmosphère des vibrations qui vous saisissent.
J’ai vu un homme pressé, s’arrêter et s’asseoir sur un banc de pierre, le visage soudain apaisé.
Un autre homme accompagnait le joueur de Hang, mais celui-ci disait des poésies.
J’ai vu ainsi les mots envahir les murs de pierre, comme des herbes en terrain conquis.
La poésie sur les murs, la poésie contre tous les murs.
Ici, il y a toujours un spectacle pour vous expliquer, pour mettre en scène ou vous faire oublier votre peur.
A Avignon, chaque été, des hommes mettent des mots sur le monde comme des pansements sur des plaies.
Les sourires sont beaux, chaque été, à Avignon.
Les hommes sont beaux quand ils inventent un monde, quand ils réalisent que leur utopie devient possible.
(A suivre...)