Mon amie en l'île
Je garde auprès de moi tout le fracas du monde,
Le regard de l’enfant, sur la route, en exil ;
Ces terres opprimées où la révolte gronde,
Le long chemin de ceux qui cherchent un asile.
J’emporte le silence et toutes mes questions,
Ces phrases commencées qui jamais ne s’achèvent,
Les idées qui se perdent en point de suspension,
Ce frisson permanent devant les heures brèves.
C’est ainsi mon amie que je m’en viens à toi,
Tout au bout du chemin, sur cette île bretonne,
En haut de l’escalier, la chambre sous les toits,
Et la musique, en bas, de ta voix qui fredonne.
Je découvre les livres par toi déposés
Au chevet de mon lit. Comme on fait d’une gamme,
En découvrant les titres, je déchiffre, amusé,
Les raisons de tes choix qui me réjouissent l’âme.
Le soir, le long du quai, tu m’écoutes, patiente,
Te parler de cet homme au cœur de ma mémoire,
De cet amour qui bat, cette passion violente.
A mes doutes, tu donnes une raison de croire.
Ainsi passe le jour, et la nuit je l’écris.
Je freine par les mots ce qui voudrait s’enfuir
Pour célébrer la vie, ses désirs et ses cris.
Je vibre à l’étincelle que je regarde luire.
Alexandre LABORIE